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Les influenceurs peuvent-ils devenir des leaders politiques ?

En 2024, la frontière entre influence et engagement politique est de plus en plus floue. Certains créateurs de contenus, suivis par des millions de jeunes, abordent ouvertement les grands enjeux de société. Écologie, discriminations, accès à l’éducation, violences policières… Des sujets lourds, autrefois réservés aux tribunes militantes ou aux discours politiques, circulent désormais sur Instagram, YouTube ou TikTok.

Ce phénomène soulève une question de fond : les influenceurs peuvent-ils, demain, devenir des figures politiques à part entière ?

Une influence qui dépasse la simple visibilité

Longtemps cantonnés à des sujets lifestyle ou divertissement, certains influenceurs français prennent aujourd’hui des positions politiques assumées. Parmi eux, Hugo Décrypte, devenu une source d’information pour une large part de la jeunesse. D’autres, comme Léna Situations ou Bilal Hassani, s’engagent ponctuellement sur des campagnes autour du droit à la différence, de la santé mentale ou de l’égalité.

Ces prises de position ont un impact réel. Lors des dernières élections européennes, plusieurs créateurs ont mobilisé leur communauté autour du vote. Certains candidats n’ont pas hésité à les inviter à débattre ou à co-produire du contenu électoral.

Une parole perçue comme plus sincère

Contrairement aux responsables politiques traditionnels, les influenceurs bénéficient souvent d’un capital confiance plus élevé auprès des jeunes. Leur communication directe, sans filtre apparent, crée un sentiment de proximité. Ils sont perçus comme “des gens comme nous” — bien qu’ils disposent souvent d’un pouvoir économique et médiatique important.

Ce lien fort est un levier. Lorsqu’un influenceur prend la parole sur une réforme, une loi ou une injustice, il peut mobiliser plus vite et plus efficacement qu’un élu ou un journaliste. C’est là que réside une forme de pouvoir politique.

Mais sans structure, sans mandat, sans vision ?

Pour autant, l’influence n’est pas encore un mandat. Les influenceurs ne sont pas tenus d’appliquer un programme, ni de rendre des comptes. Leur légitimité repose sur leur image, non sur une élection ou une formation. Cela limite leur capacité à transformer leur parole en action concrète, institutionnelle, durable.

Les rares tentatives d’“influenceurs-candidats” n’ont pas encore marqué les esprits. Les jeunes eux-mêmes restent prudents : ils écoutent, interagissent, relayent, mais n’accordent pas automatiquement leur crédit politique à ces figures issues du web.

Une transformation du pouvoir politique

En réalité, ce que révèle ce glissement, c’est une transformation plus profonde de la politique. Elle ne se joue plus uniquement dans les institutions, mais dans les récits, les communautés, les contenus. Les influenceurs occupent l’espace vide laissé par des partis déconnectés. Ils mettent des mots simples sur des réalités complexes. Ils parlent à une jeunesse que les institutions ne comprennent plus toujours.

Le pouvoir politique ne sera peut-être plus uniquement porté par des élus, mais aussi par des figures hybrides, à la croisée de la culture, de la parole publique et de l’influence numérique.

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